Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 15 Septembre 2025
Le trio de Dai, devenu quartet avec le prodige (mais alcoolique au dernier degré) Joe, arrive au terme de sa halte en Floride. Et avant un dernier concert à Orlando, Dai compte bien se surpasse encore à Tampa, où Sheryl et lui se sont donné rendez-vous. D'un côté, les retrouvailles avec la jeune femme qui lui plaît tant pourraient, au bout du concert, prendre un certain tournant. De l'autre côté, en plein concert, notre héros démontre encore son désir de progresser et de tâtonner pour créer son propre jazz, ici en osant chercher à renouveler ses solos et en cassant ses habitudes. Autant côté musique que côté humain, entre les concert, les retrouvailles et les rencontres, cette virée en Floride aura été importante... mais ce n'est peut-être rien à côté de l'intensité que va proposer, dans ce dernier volume de Blue Giant Explorer, l'ultime halte du saxophoniste japonais et des siens avant de se rendre à New York.
C'est par l'intermédiaire de Zod qu'arrive effectivement une proposition: d'abord passer par Boston, une ville essentielle à parcourir car véritable cité de jazz, comme en atteste la célèbre et internationale université de musique de Berklee. Sur place, le but est de s'imprégner de la musique nouvelle, c'est-à-dire celle des jeunes, puis de se faire connaître auprès d'eux. Mais au-delà de cet enjeu majeur sur le plan musical, c'est aussi un enjeu plus personnel auquel doit penser Dai, car Boston, c'est la ville où étudie désormais celui qui fut son premier partenaire et qu'il n'a jamais revu depuis qu'il a quitté le Japon: Yukinori Sawabe. Et il ne fait aucun doute que sur place, les deux garçons finiront par se croiser...
Au fil d'une narration très appliquée, Shinichi Ishizuka va alors, inévitablement, se focaliser parallèlement sur chacun des deux personnages-clés de ce tome, à commencer évidemment par Dai qui, pour la première fois de façon aussi prégnante, est rattrapé par son passé, lui qui a toujours foncé en avant dans son rêve. Alors, comment appréhender les futures retrouvailles avec Sawabe à qui il n'a jamais donné de nouvelles, sans pour autant l'oublier ? Arrivera-t-il à le regarder en face ? Que ressentira-t-il le moment venu ?
Quant au si attachant et charismatique Sawabe, nous l'avions laissé sur ce terrible accident ayant brisé sa main droite et ayant scellé son destin de pianiste auprès de Dai, et on le retrouve ici toujours aussi passionné par la musique, mais d'une autre manière, en ayant privilégié la composition. En nous présentant ce qui est son quotidien à l'université de Berklee, l'auteur frappe assez fort en évoquant efficacement le regard que les autres portent sur lui en tant que handicapé, et en nous faisant bien comprendre que, même si sa main droite n'est toujours pas en état, le jeune homme n'a aucunement laissé tomber.
Entre ces deux êtres, les retrouvailles ne pourront alors qu'être très intenses... encore plus en y mêlant un troisième larron essentiel: le pianiste du présent, Antonio. Maintenant que Dai a retrouvé son tout premier compagnon, que compte faire le jeune mexicain ? Est-il toujours le compagnon le plus légitime de de Dai ? Que pourra-t-il lui-même ressentir ?
C'est en tirant au mieux parti de chacun de ces trois personnages qu'Ishizuka va livrer des instants marquants, aussi bien sur le plan purement humain que dans les aspects relationnels (voir Dai autant en larmes, ce n'est tellement pas dans ses habitudes que ça fait quelque chose) et, surtout, à travers la musique, le jazz et un concert parmi les plus puissants qu'on ait pu voir de par ce qu'il montre et véhicule.
A l'arrivée, pour cristalliser de plus belle tout le parcours de Dai depuis ses débuts au Japon, il ne pouvait pas y avoir plus beau et plus symbolique que ces retrouvailles puissantes. Et si le jazz est la musique de l'émotion, ça n'a peut-être jamais été aussi vrai que dans ce volume, qui conclut merveilleusement la troisième partie de la saga Blue Giant.